L’antenne International Security and Defense a sélectionné pour vous les informations importantes de la semaine du 11 janvier. L’article a été rédigé par Clarisse Bruneton.
L’achat par la Grèce de 18 Rafale à la France
En décembre 2020, le Parlement grec approuvait le budget 2021 qui prévoyait de consacrer 5,5 milliards d’euros à la défense notamment à l’achat de 18 Rafale français après avoir négocié un contrat avec le ministère des Armées françaises en septembre. C’est chose faite, le Premier ministre grec a annoncé samedi 9 janvier l’acquisition des 18 Rafale de Dassault Aviation dans un contexte marqué par les tensions avec la Turquie.
Cet achat permet au gouvernement grec de moderniser sa défense aérienne, un atout important dans la bataille d’influence que se livrent la Grèce et la Turquie en Méditerranée, dans laquelle la Grèce avait perdu son influence. D’un point de vue interne, le gouvernement, par cet achat, entend adopter un visage répressif dans la lignée de sa stratégie politique.
En ne se tournant pas vers les États-Unis, allié traditionnel de la Turquie et principal fournisseur des pays européens, la Grèce entend diversifier son soutien et son approvisionnement et a pour cela sollicité la France. Liée par un accord intergouvernemental, la Grèce récupérera 12 Rafale d’occasion et a passé commande de 6 avions neufs, ce qui est une aubaine pour l’industrie aéronautique et ce dont la ministre des Armées s’est d’ailleurs félicitée : « pour la première fois, un pays européen souhaite se doter d’avions de combat Rafale ».
Le Rafale séduit : en juillet 2020, 5 Rafale ont intégré l’Armée de l’Air indienne dans le cadre de la commande de 36 Rafale par le gouvernement indien, commande qui pourrait se renouveler à l’avenir.
Cette présence à l’internationale de la France se manifeste par le déplacement de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, en Croatie, pays auquel il propose 12 Rafale d’occasion pour promouvoir l’offre française d’avions de combat. Si l’offre est acceptée, la coordination dans le temps sera importante entre les contrats grec et croate, comme l’a rappelé le général François Lecointre.
Attaques rebelles en Centrafrique
Le mercredi 13 janvier, le ministre centrafricain de l’intérieur, Henri Wanzet Linguissara a annoncé que plusieurs secteurs de Bangui avaient été attaqués mais les attaques ont été repoussées par les forces nationales et les casques bleus dont l’un d’entre eux a laissé la vie.
Plusieurs jours avant l’attaque, planait la rumeur d’une offensive de la Coalition des patriotes pour le changement (CPC), formée à la mi-décembre, afin de réitérer l’offensive du 5 décembre 2013 où les groupes anti-balaka avaient attaqué la capitale Bangui dans le but de renverser le pouvoir en place. Il s’agit des premiers affrontements aux portes de la ville depuis que les principaux groupes armées, occupant les deux tiers du pays depuis le début de la guerre civile, ont annoncé vouloir empêcher la réélection du président Faustin Archange Touadéra.
Actuellement, 12 000 casques bleus de la mission des Nations Unies en Centrafrique sont déployés et sont appuyés par des contingents armés de militaires rwandais et de paramilitaires russes dans l’objectif de repousser les attaques des rebelles. Dans ce contexte de crise, l’ONU avait pris la décision le 27 décembre de renforcer la force de paix avec 300 casques bleus rwandais, auparavant déployés au Soudan du Sud afin d’assurer la sécurité des élections présidentielles centrafricaines.
Le 13 janvier se tenait le Conseil de sécurité de l’ONU, réuni à la demande de la France pour discuter de la présence de troupes étrangères et de mercenaires en Centrafrique et du maintien ou non de l’embargo sur les armes, en vigueur depuis que la guerre civile a commencé en 2013.
Les attaques sont successives : à Bouar et à Grimari les groupes armés ont tenté le week-end du 10 janvier de pénétrer en force dans les villes mais ont été vaillamment repoussés par les casques bleus. Les membres africains du Conseil de sécurité ont réclamé la tenue d’une seconde session le 19 ou le 21 janvier suite à la requête de la Centrafrique pour renforcer les capacités défensives de la MINUSCA grâce à des hélicoptères de combat, que la Turquie serait prête a déployer.
L’Arménie et l’Azerbaïdjan signent une déclaration commune à Moscou concernant le Haut-Karabakh
Lundi 11 janvier Vladimir Poutine a convié à Moscou le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, et le président d’Azerbaïdjan, Ilham Aliev à discuter de l’application de l’accord de cessez-le-feu, signé le 9 novembre qui a mis fin a 6 semaines de combats en Haut-Karabakh et à une défaite de l’Arménie qui a en conséquence perdu plusieurs territoires.
Entre le 27 septembre et le 10 novembre 2020 s’est déroulée la deuxième guerre du Karabakh, opposant l’Arménie soutenue par la Russie et l’Azerbaïdjan soutenu par la Turquie, se soldant par une perte des deux tiers du territoire contrôlés par les Arméniens depuis 1994 (première guerre) qu’ils considèrent comme leur appartenant de droit au mépris de l’Azerbaïdjan.
Cette rencontre glaciale, la première depuis la signature du cessez-le-feu, avait pour objectif de trouver un terrain d’entente pour la région dans son ensemble. En effet, étant très enclavée, l’Arménie vit dans un isolement économique, les seules frontières praticables sont celles de la Géorgie avec qui les relations ne sont pas toujours au beau fixe et avec l’Iran, pays faisant l’objet de sanctions internationales.
A l’issue de cette rencontre, une déclaration commune a été signée prévoyant la création d’un groupe de travail tripartite qui sera coprésidé par les trois vices-Premiers ministres. Son objectif, défini avant le 1er mars 2021, est de permettre le rétablissement des voies de communication économique, commerciale et de transport dans la zone tout en débloquant les frontières au Haut-Karabakh qui sont restées aux mains de l’Arménie. Avec ces aménagements, Bakou, pourrait bénéficier d’une route directe via le sud de l’Arménie, ce qui désenclaverait un peu plus le pays, qui serait alors plus autonome.
Les mesures prises par la France en matière de défense
Le 11 janvier, le général François Lecointre, chef d’état-major français a publié une déclaration en faveur d’un renforcement de la singularité de l’armée permettant la survie de la France en cas de menace existentielle.
Le chef d’état-major nous rappelle que la singularité militaire repose sur des principes fondamentaux que sont la discipline, garantissant la subordination des forces armées au pouvoir politique ; la réactivité et la disponibilité qui permettent d’éviter toute surprise, illustrées par la dissuasion nucléaire qui en est le principal outil ; la capacité d’action indépendante qui assure la pleine compétence de l’armée et enfin l’éthique qui constitue une culture militaire partagée par tous les membres civils et militaires des forces armées.
Aujourd’hui, la singularité militaire française a été affecté par plusieurs changements fonctionnels qui favorise la gestion au commandement dans l’organisation opérationnelle, qui consacre l’externalisation et se caractérise par un cruel manque de réserves en ressources humaines militaires.
Afin de rénover la singularité militaire française, le chef d’état-major explique que l’objectif des prochaines années sera de moderniser notre outil de défense. Cette volonté s’inscrit dans la lignée de l’objectif fixé par le président de la République, à savoir la création d’un porte-avions à propulsion nucléaire opérationnel d’ici 2038 pour remplacer le Charles de Gaulle. La ministre des Armées, Florence Parly, avait d’ailleurs annoncé que le porte-avions serait conçu pour déployer le futur système d’avions de combat (FCAS) et qu’il pourra déployer une trentaine de ces avions. En choisissant l’option du nucléaire, d’autres décisions majeures devraient suivre, notamment dans le domaine des catapultes pour lequel la France n’a aucune expertise.
De la même manière, un contrat a été signé le 30 décembre 2020 avec Thales et Dassault Aviation pour le programme stratégique de renseignement aéroporté Archange afin de renforcer les capacités de renseignement sur les signaux du pays grâce au système de guerre électronique connu sous le nom de CUGE (capacité universelle de guerre électronique).
Ces avancées interviennent dans le cadre de la loi de programme militaire 2019-2025 destinée à réparer l’outil de défense français.